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Lirieke: Rosa Bordas. Other. La Canaille.


Dans la vieille cite francaise
Existe une race de fer
Dont l'ame comme une fournaise
A de son feu bronze la chair.
Tous ses fils naissent sur la paille,
Pour palais ils n'ont qu'un taudis,
C'est la canaille, eh bien j'en suis.

Ce n'est pas le pilier de bagne,
C'est l'honnete homme dont la main
Par la plume ou le marteau gagne
En suant son morceau de pain.
C'est le pere enfin qui travaille
Les jours et quelquefois les nuits,
C'est la canaille, eh bien j'en suis.

C'est l'artiste, c'est le boheme
Qui sans souffler rime reveur,
Un sonnet a celle qu'il aime
Trompant l'estomac par le c?ur.
C'est a credit qu'il fait ripaille,
Qu'il loge et qu'il a des habits,
C'est la canaille, eh bien j'en suis.

C'est l'homme a la face terreuse,
Au corps maigre, a l'?il de hibou,
Au bras de fer, a main nerveuse,
Qui sortant d'on ne sait pas ou,
Toujours avec esprit vous raille
Se riant de votre mepris,
C'est la canaille, eh bien j'en suis.

C'est l'enfant que la destinee
Force a rejeter ses haillons
Quand sonne sa vingtieme annee,
Pour entrer dans nos bataillons.
Chair a canon de la bataille,
Toujours il succombe sans cri,
C'est la canaille, eh bien j'en suis.

Ils fredonnaient la Marseillaise,
Nos peres, les vieux vagabonds,
Attaquant en quatre-vingt-treize
Les bastilles dont les canons
Defendaient la muraille
Que de trembleurs ont dit depuis
"C'est la canaille, eh bien j'en suis"

Les uns travaillent par la plume,
Le front degarni de cheveux,
Les autres martelent l'enclume
Et se saoulent pour etre heureux
Car la misere en sa tenaille
Fait saigner leurs flancs amaigris,
C'est la canaille, eh bien j'en suis.

Enfin c'est une armee immense
Vetue en haillons, en sabots
Mais qu'aujourd'hui la vieille France
Les appelle sous ses drapeaux
On les verra dans la mitraille,
Ils feront dire aux ennemis
"C'est la canaille, eh bien j'en suis".
Rosa Bordas
Rosa Bordas