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Lirieke: Henri Tachan. AZ 2. Ma Femme.


Tu es l'enfant que je n'ai pas voulu,
Tu es la mere qu'un jour je n'aurai plus,
Tu es l'ami que racontent les bardes,
Ma femme,
Tu es tout ceux que je n'ai pas aimes:
Vingt ans de peur, y a pas d'feu sans fumee,
Et ce feu-la, fragile, je te le garde,
Ma femme,
Et puis, conjugalement parlant,
On ne ressemble pas a ces gens
Qui s'epousaillent et qui se taisent,
L'habitude a beau faire sa cour,
Notre petit foyer sur cour
Cherche la mer et ses falaises...

Tu es l'enfant qui sanglote et s'endort,
Cet oiseau blanc qui revient vers le Nord
Tu es l'oiseau de tiedeur et de plumes
Ma femme,
Tu es la lionne qui veille des petits
Qui sont aux autres, pas les siens - comme on dit -
Tu es la lionne aimante et redoutable,
Ma femme,
Et puis, zoologiquement parlant,
On ne ressemble pas a ces clans
Qu'on apprivoise et qu'on apaise,
L'habitude a beau faire sa cour,
Notre petit Kenya sur cour
Cherche sa jungle et son Zambeze...

Tu es l'enfant etrange qui s'entete
A preferer le genre humain aux betes,
Tu es l'enfant qui croit toujours au Monde,
Ma femme,
Tu es la bouche des pauvres qu'on musele,
Le poing tendu des manchots, des rebelles,
Tu es l'Espoir qui palpite et qui gronde,
Ma femme,
Et puis, socialement parlant,
On ne ressemble pas a ces Durand
Qui cocoriquent, qui marseillaisent,
L'habitude a beau faire sa cour,
Notre petite patrie sur cour
C'est un vieux sentier de Correze...

Tu es l'enfant qui supplie dans le noir:
"Dis, s'il te plait, racont'e-moi une histoire,
Celle ou le loup n'a pas mange la chevre..."
Ma femme,
Et je murmure: "Il etait une fois..."
Et te voila partie a travers bois,
Petite chevre accrochee a ton reve,
Ma femme,
Et puis, tout betement parlant,
Nous, on ressemble a ces enfants
Qui se rechauffent et qui se plaisent,
L'habitude a beau faire sa cour,
Notre petit bonheur sur cour
Se cache entre ses parentheses...

Tu es l'enfant que je n'ai pas voulu,
Tu es la mere qu'un jour je n'aurai plus,
Tu es l'ami que racontent les bardes,
Ma femme!