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Lirieke: Barbara. Mes Hommes.

Ils marchent le regard fier,
Mes hommes,
Moi devant, et eux derriere,
Mes hommes
Et si j'allonge le pas,
Ils me suivent pas a pas.
Je leur echappe pas,
Mes hommes, mes hommes.

Ou que je sois, ils sont la,
Mes hommes.
Je n'ai qu'a tendre les bras,
En somme.
Je les regarde venir,
Fiere de leur appartenir.
C'est beau de les voir sourire,
Mes hommes.

Moi qui suis fille des brumes,
En somme,
De la nuit et de la lune,
Tout comme,
Quand j'arrive, le teint clair,
Moi devant et eux derriere,
Je comprends bien que les gens
S'etonnent, s'etonnent

Car, ils viennent de Tunisie,
Mes hommes,
Marseille, Toulon, le Midi,
Mes hommes.
Ils marchent avec insolence,
Un petit rien dans la hanche.
Ca ressemble a une danse,
Mes hommes.

Ils ne m'appellent Madame,
Mes hommes
Mais, tendrement, ils me nomment
Patronne.
Ils se soumettent a ma loi.
Je me soumets a leur loi.
Que c'est doux d'obeir
A mes hommes.

Tout d'amour et de tendresse,
Mes hommes,
M'ont fait une forteresse,
Mes hommes.
Non, vous ne passerez pas.
C'est a eux, n'y touchez pas.
Ils sont violents, quelquefois,
Mes hommes, mes hommes.

Ils se sont fait sentinelles,
Mes hommes.
Ils pourraient etre cruels,
Mes hommes.
Ils me veillent, comme moi
Je les veille quelquefois.
Moi pour eux, et eux pour moi,
Mes hommes.

Quand naissent les premieres feuilles
D'automne,
Quand le chagrin se fait lourd,
Mes hommes,
Vont se mettre, sans un mot,
Debout autour du piano
Et me disent tendrement,
Patronne, patronne.

C'est fou comme ils sont heureux,
Mes hommes,
Quand le son du piano noir
Resonne.
Ils vont faire leurs bagages
Et on reprend le voyage.
Faut qu'ils voient du paysage,
Mes hommes.

Quand descend la nuit furtive,
Mes hommes.
A pas de loup, ils s'esquivent.
Personne.
Ils vont chasser dans la nuit.
Bergers, gardez vos brebis
Qui ont le gout et l'envie,
Des hommes, des hommes

Car, de la blonde a la rousse,
Mes hommes,
Ils vont coucher leur peau douce,
Mes hommes
Et repartent dans la nuit,
Courtois, mais pas attendris
Quand ils ont croque le fruit,
La pomme.

Ils reviennent au matin,
Mes hommes,
Avec des fleurs dans les mains,
Mes hommes
Et restent la, silencieux,
Timides, baissant les yeux
En attendant que je leur
Pardonne.

Ils ont installe mon lit,
Mes hommes,
Au calme d'une prairie,
Mes hommes.
Je peux m'endormir a l'ombre.
Ils y creuseront ma tombe
Pour la longue nuit profonde
Des hommes, des hommes.

Pas de pleurs, pas une larme,
Mes hommes,
Je n'ai pas le gout du drame,
Mes hommes,
Continuez, le regard fier.
Je serai la, comme hier,
Vous devant, et moi derriere,
Mes hommes